Chacun voit midi à sa porte, dit l’adage populaire. Mais que voyons-nous depuis notre petite porte ? Nous voyons que nous nous privons de la vue du midi depuis la porte de l’autre, mon frère, mon inconnu, et des midis de tous les autres. Petit midi, ma petite porte d’où je crois tout voir et tout savoir, tout embrasser et tout enfermer. Se contenter, être content, de voir midi à sa porte, c’est se priver de toutes les autres heures, de tous les autres lieux.
Un autre adage nous dit qu’il faut savoir où on habite. Mais si on s’éloigne de quelques pas de cette porte, en se retournant on n’y verra que l’entrée d’un petit terrier, obstrué par une porte qui claque et que trop souvent on ferme. Et le temps de se retourner, il n’est déjà plus midi, déjà midi et une seconde, midi et deux secondes.
Il est déjà après-midi et le temps file comme toutes mes certitudes. Qu’est-ce que je croyais voir et retenir ? On n’enferme pas le midi plein. Il est temps de quitter nos pas de porte, de franchir d’autres pas et d’ouvrir d’autres portes à tous les midis du monde. Éternel voyageur vers la porte de l’infini qui jamais ne se ferme.
Retrouvez l’ensemble des textes déjà parus, dans la rubrique Archives – © Jean Dumonteil